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Les conditions du licenciement pour motif économique dans le droit du travail japonais

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Les conditions du licenciement pour motif économique dans le droit du travail japonais

L’environnement de gestion des entreprises est en constante évolution, influencé par les fluctuations du marché, les innovations technologiques et l’intensification de la concurrence mondiale. Dans ce contexte, pour que les entreprises puissent croître de manière durable et maintenir leur compétitivité, il est essentiel de revoir leur structure d’activité et de restructurer leur organisation. Au cours de ce processus, il peut malheureusement arriver qu’elles doivent envisager des réductions de personnel, autrement dit des “licenciements pour motif économique”. En droit du travail japonais, ces licenciements sont effectués pour des raisons liées à la gestion de l’entreprise, telles que des difficultés financières ou une réorganisation des activités. Cependant, le droit du travail au Japon protège fortement la position des travailleurs et limite sévèrement le droit de l’employeur de résilier unilatéralement le contrat de travail. La base légale de cette protection est l’article 16 de la Loi japonaise sur les contrats de travail, qui stipule que “le licenciement est invalide lorsqu’il manque de raisons objectivement raisonnables et n’est pas reconnu comme étant approprié selon les normes sociales” . Cela codifie le principe connu sous le nom de “théorie de l’abus du droit de licenciement”, établi au fil des années par la jurisprudence. En particulier, dans les cas de licenciements pour motif économique où le travailleur n’est pas fautif, les tribunaux appliquent cette théorie de manière plus stricte. Le cadre de cette évaluation est constitué par les “quatre éléments du licenciement pour motif économique”, établis par la jurisprudence passée . Ces éléments ne sont pas simplement une liste de vérification, mais des lignes directrices que les tribunaux prennent en compte de manière globale en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas pour juger de la validité du licenciement . Cet article vise à expliquer en détail ces quatre éléments du licenciement pour motif économique, en les illustrant avec des exemples de jurisprudence japonaise, afin d’aider les dirigeants d’entreprise et les responsables juridiques à comprendre ce thème important du droit du travail au Japon.

Premier élément : la nécessité de réduire les effectifs

Le premier élément pour qu’un licenciement économique soit reconnu valide est la nécessité de réduire les effectifs. Cela signifie que l’entreprise doit prouver, sur la base de données objectives, que la réduction du personnel est essentielle pour la gestion de l’entreprise. Il est difficile de satisfaire à cette exigence en se basant uniquement sur le désir d’augmenter les profits ou sur une vague inquiétude concernant l’avenir.

Les situations typiques où les tribunaux reconnaissent la nécessité de réduire les effectifs incluent des pertes continues et significatives, un surendettement ou la fermeture d’une division spécifique ou d’une usine. Par exemple, dans l’affaire United Airlines (jugement de la Cour d’appel de Tokyo du 22 décembre 2021 (2021)), la compagnie aérienne a contesté les licenciements économiques suite à la fermeture de son bureau de Narita en raison d’une forte diminution du volume d’activités sur les lignes internationales. Le tribunal a jugé que la décision de fermer le bureau était rationnelle et que la nécessité de réduire les effectifs qui en découlait était élevée.

Cependant, il existe des cas où la nécessité de réduire les effectifs est niée. Dans l’affaire Barclays Securities (jugement du Tribunal de district de Tokyo du 13 décembre 2021 (2021)), une institution financière étrangère a licencié un employé suite à l’abolition d’un poste de direction spécifique. Toutefois, le tribunal a jugé que la gestion globale de l’entreprise n’était pas en situation de crise et que l’abolition d’un poste ne signifiait pas immédiatement la nécessité de réduire les effectifs, rendant ainsi le licenciement invalide. Cette décision suggère que la « nécessité d’abolir un poste » et la « nécessité de réduire les effectifs » sont évaluées séparément.

De plus, lorsqu’une entreprise revendique la nécessité de réduire les effectifs, la cohérence avec d’autres actions de gestion de l’entreprise est examinée. Si une entreprise procède à des réductions de personnel tout en embauchant un grand nombre de nouveaux employés, par exemple, les tribunaux ont tendance à douter de la nécessité de réduire les effectifs. Dans l’affaire Senshu Gakuen (jugement de la Cour d’appel d’Osaka du 15 juillet 2011 (2011)), le tribunal a indiqué que la méthode consistant à licencier des employés à coût salarial élevé et à embaucher presque le même nombre d’employés à coût salarial plus bas n’est, en principe, pas autorisée.

Par conséquent, les entreprises doivent préparer des preuves objectives telles que des bilans, des plans d’affaires, des procès-verbaux de réunions du conseil d’administration et défendre de manière logique et cohérente que la réduction des effectifs est une mesure inévitable pour la gestion de l’entreprise.

Le deuxième élément : Les efforts pour éviter le licenciement

Le deuxième élément concerne les efforts déployés pour éviter le licenciement. Les tribunaux japonais considèrent le licenciement collectif comme un « dernier recours » et estiment que l’employeur a l’obligation de prendre toutes les mesures alternatives possibles avant de procéder à un licenciement.

Les efforts pour éviter le licenciement, tels qu’attendus par les tribunaux, incluent diverses mesures. Plus précisément, elles peuvent comprendre :

  • La réduction des heures supplémentaires
  • La restriction ou l’arrêt des nouvelles embauches
  • La suspension du renouvellement des contrats des employés non réguliers
  • La mutation ou le détachement dans d’autres départements ou filiales
  • La réduction des rémunérations des dirigeants
  • La mise en œuvre de fermetures temporaires
  • La proposition de départs volontaires avec des conditions avantageuses, telles qu’une augmentation de l’indemnité de départ

L’étendue des mesures à prendre dépend de chaque cas. Dans l’évaluation de la validité d’un licenciement collectif, ces efforts pour éviter le licenciement constituent un élément extrêmement important. Le cas classique de référence est l’affaire Asahi Kindergarten (décision de la Cour suprême du 27 octobre 1983 (1983)). Dans cette affaire, la Cour suprême a jugé le licenciement invalide parce que l’employeur n’avait fait aucun effort pour recruter des volontaires pour le départ ou pour expliquer la nécessité de la réduction du personnel et demander la coopération des employés. Ce jugement a clairement établi que les efforts pour éviter le licenciement ne sont pas seulement formels, mais constituent une obligation de bonne foi.

À l’inverse, dans l’affaire United Airlines mentionnée précédemment, la société a proposé aux personnes concernées par le licenciement une mutation vers des postes au sol avec le maintien du même niveau de salaire, ainsi qu’un système de retraite anticipée avec un ajout de 20 mois de salaire de base à l’indemnité de départ. Le tribunal a évalué ces mesures comme des « efforts de prévention du licenciement suffisants » et les a considérées comme une raison de valider le licenciement. Cependant, dans l’affaire Hokuei Fukui (décision de la branche de Kanazawa de la Cour d’appel de Nagoya du 31 mai 2006 (2006)), bien que le recrutement de volontaires pour le départ ait été effectué, l’augmentation de l’indemnité de départ était d’environ un mois de salaire de base, ce qui a été jugé insuffisant comme mesure de prévention du licenciement.

Cependant, le degré d’effort pour éviter le licenciement requis est corrélé à l’importance de la « nécessité de réduction du personnel », le premier élément. De plus, la situation spécifique de l’entreprise est également prise en compte. Par exemple, dans l’affaire Carnival Japan (décision du Tribunal de district de Tokyo du 29 mai 2023 (2023)), il s’agissait d’un cas de licenciement collectif par une entreprise qui ne pouvait plus opérer de croisières en raison de l’impact du coronavirus. Bien que l’entreprise n’ait pas recruté de volontaires pour le départ, le tribunal n’a pas jugé que les efforts pour éviter le licenciement étaient insuffisants pour cette raison. Le tribunal a considéré que le risque de perdre des employés hautement spécialisés, essentiels à la reprise des activités, si un recrutement de volontaires avait été effectué, rendait la décision de l’entreprise raisonnable. Cet exemple montre que les quatre éléments ne sont pas une liste de vérification rigide, mais sont jugés de manière flexible en fonction de la situation dans laquelle se trouve l’entreprise.

Le troisième élément : La rationalité dans la sélection des employés licenciés

Le troisième élément concerne la nécessité que les critères de sélection des employés à licencier soient objectifs et rationnels, et que leur application soit équitable. Comme le licenciement pour motif économique ne repose pas sur la responsabilité des employés, il est impératif d’éviter toute décision arbitraire ou intention discriminatoire de la part de l’employeur.

Les critères de sélection jugés raisonnables par les tribunaux incluent généralement les éléments suivants :

  • Les résultats d’évaluations du personnel objectives
  • La situation de présence au travail (comme le nombre de jours d’absence non justifiée)
  • L’existence de compétences ou de qualifications spécifiques nécessaires pour l’avenir de l’entreprise
  • L’appartenance à une division de l’entreprise qui va être fermée

En revanche, certains critères sont souvent jugés irrationnels ou à haut risque juridique. Par exemple, des critères abstraits et subjectifs tels que le « potentiel futur » ou la « capacité à collaborer » peuvent être rejetés pour manque d’objectivité. De plus, la sélection basée sur le sexe, la nationalité ou l’appartenance à un syndicat peut être considérée comme discriminatoire et donc illégale. Utiliser l’âge comme critère principal peut également être jugé irrationnel en raison des difficultés de réemploi.

Il est crucial que non seulement les critères soient rationnels, mais aussi que leur application soit juste. Même si des critères rationnels existent sur le papier, si l’évaluation du personnel qui les sous-tend est injuste ou si les critères sont appliqués de manière arbitraire pour cibler certaines personnes, la rationalité de la sélection sera remise en question. Les entreprises doivent établir des critères de sélection objectifs avant d’identifier les employés à licencier et conserver des enregistrements expliquant pourquoi ces critères ont été appliqués à chaque personne concernée.

De plus, dans les pratiques d’emploi au Japon, les tribunaux s’attendent à ce que les entreprises réduisent d’abord le nombre d’employés non réguliers, tels que les travailleurs intérimaires ou contractuels, avant de procéder au licenciement de salariés en CDI. Avant de prendre la décision de licencier des employés réguliers, le fait d’avoir pris de telles mesures peut également être pris en compte dans l’évaluation de la rationalité de la sélection.

Le quatrième élément : l’équité de la procédure

Le dernier élément est l’équité de la procédure. Cela signifie que l’employeur a l’obligation de fournir une explication suffisante aux employés concernés par un licenciement ou au syndicat, concernant la nécessité et le contenu du licenciement collectif, et de négocier de bonne foi.

Cette explication et négociation ne doivent pas être une simple notification unilatérale. Il est nécessaire que cela soit une communication bidirectionnelle visant à obtenir la compréhension et la coopération des employés. Les sujets à discuter incluent généralement les éléments suivants :

  • Les raisons commerciales nécessitant une réduction du personnel (premier élément)
  • Le calendrier, l’ampleur et la méthode du licenciement collectif
  • Le contenu des efforts déployés pour éviter les licenciements (deuxième élément)
  • Les critères de sélection des personnes à licencier (troisième élément)

L’importance de cette procédure a été soulignée dans de nombreux cas juridiques. Dans l’affaire précitée de la garderie Asahi, le fait que l’employeur n’ait fourni aucune explication ou négociation préalable avant d’annoncer les licenciements a été une raison majeure de l’invalidation du licenciement. À l’inverse, dans l’affaire United Airlines, le fait que la société ait mené plusieurs négociations collectives avec le syndicat et fourni des explications détaillées a été évalué comme satisfaisant à l’équité de la procédure. Même si les négociations n’ont finalement pas abouti à un accord, le fait d’avoir suivi un processus de négociation sincère est en soi important.

Des exemples typiques de procédures jugées inéquitables incluent le refus de présenter des documents financiers pour expliquer la situation économique ou lorsque le nombre de réunions de négociation est extrêmement limité, ou encore lorsque les négociations sont menées de manière formelle juste avant le licenciement. Pour les entreprises, il est essentiel de ne pas négliger le processus de négociation, de prendre le temps nécessaire pour fournir des explications détaillées et de conserver les procès-verbaux de ces discussions comme preuve afin de prévenir les conflits ultérieurs.

Comparaison et analyse des principaux cas de jurisprudence

Afin de comprendre comment les quatre éléments que nous avons précédemment expliqués sont appliqués dans les procès réels et comment les décisions peuvent varier, examinons une comparaison des principaux cas de jurisprudence. Le tableau ci-dessous résume les éléments contestés et les points clés des décisions des tribunaux pour les cas représentatifs abordés dans cet article.

Tribunal & Date du jugementÉléments principaux contestésDécision (Valide/Invalide)Résumé des raisons de la décision du tribunal
Cour d’appel de Tokyo, 29 octobre 1979Nécessité, efforts pour éviter le licenciement, sélection des personnesValideA établi le prototype des quatre éléments pour juger la validité d’un licenciement économique. La fermeture d’une division non rentable a été jugée nécessaire pour la gestion, et les efforts pour éviter le licenciement ont été considérés comme suffisants.
Cour suprême, 27 octobre 1983Efforts pour éviter le licenciement, équité de la procédureInvalideLe manquement à solliciter des volontaires pour le départ à la retraite et à fournir des explications et des discussions suffisantes a été jugé contraire au principe de bonne foi et constitue un abus du droit de licenciement.
Cour d’appel de Tokyo, 22 décembre 2021Efforts pour éviter le licenciement, équité de la procédureValideLa proposition de réaffectation avec un salaire équivalent et un système généreux de départ volontaire à la retraite a été évaluée comme un effort suffisant pour éviter le licenciement, et les négociations répétées avec le syndicat ont été jugées équitables.
Tribunal de district de Tokyo, 13 décembre 2021Nécessité, efforts pour éviter le licenciementInvalideLa suppression d’un poste spécifique n’est pas directement liée à la nécessité de réduire le personnel dans l’ensemble de l’entreprise. De plus, il a été jugé que les efforts pour envisager d’autres mesures alternatives, telles que la rétrogradation, étaient insuffisants.
Tribunal de district de Tokyo, 29 mai 2023Efforts pour éviter le licenciementValideDans le contexte particulier de la pandémie de COVID-19, il a été jugé raisonnable de ne pas solliciter de départs volontaires à la retraite afin de prévenir la fuite de personnel essentiel à la reprise des activités.

Résumé

En droit du travail japonais, le licenciement pour motif économique est soumis à un contrôle judiciaire extrêmement rigoureux en vertu de l’article 16 de la loi japonaise sur les contrats de travail. Les tribunaux prennent en compte de manière globale quatre éléments essentiels : la nécessité de réduire le personnel, les efforts pour éviter le licenciement, la rationalité de la sélection des employés licenciés et l’adéquation de la procédure. Ces éléments ne sont pas des exigences rigides, mais sont évalués de manière globale en fonction de la situation de gestion de l’entreprise et des circonstances spécifiques à chaque cas. Pour les entreprises envisageant un licenciement pour motif économique, il est essentiel de préparer des preuves objectives qui serviront de base à la décision de gestion, de faire des efforts sincères pour éviter les licenciements, de sélectionner les personnes concernées selon des critères équitables et, surtout, de documenter et d’enregistrer en détail tout le processus de consultation honnête avec les employés et les syndicats. Négliger ne serait-ce qu’une seule de ces étapes peut entraîner l’invalidité du licenciement et exposer l’entreprise à des risques de gestion graves, tels que l’obligation de payer d’importantes sommes au titre des salaires impayés.

Le cabinet d’avocats Monolith possède une vaste expérience dans le soutien d’une multitude de clients, tant nationaux qu’internationaux, en matière de droit du travail japonais, en particulier dans les questions de restructuration d’entreprise et les problèmes de personnel qui en découlent. Notre cabinet compte plusieurs avocats qualifiés au Japon, ainsi que des avocats anglophones qualifiés à l’étranger, ce qui nous permet de répondre aux défis spécifiques des entreprises dans un environnement commercial international. Face à une décision de gestion aussi cruciale que le licenciement pour motif économique, nous offrons un soutien juridique stratégique à toutes les étapes, depuis la planification initiale, l’examen des mesures pour éviter les licenciements, l’élaboration des critères de sélection, la consultation avec les employés, jusqu’aux éventuels litiges devant les tribunaux.

Managing Attorney: Toki Kawase

The Editor in Chief: Managing Attorney: Toki Kawase

An expert in IT-related legal affairs in Japan who established MONOLITH LAW OFFICE and serves as its managing attorney. Formerly an IT engineer, he has been involved in the management of IT companies. Served as legal counsel to more than 100 companies, ranging from top-tier organizations to seed-stage Startups.

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